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All Shall Be Well: Refaire famille

Laïss Barkouk (Surimpressions)

Dans All Shall Be Well , la pudeur s'invite partout. Pudeur du regard porté sur la longue relation entre deux femmes dans un Hong Kong où le mariage pour tous·tes n'existe pas. Pudeur de la caméra qui filme la mort de l'une d'elles sans la montrer. Pudeur encore dans la manière de filmer le deuil de celles et ceux qui restent. Après Un printemps à Hong Kong, le réalisateur Ray Yeung signe un nouveau drame sur les romances invisibles.

Pat (Maggie Li Lin Lin) et Angie (Patra Au) sont en couple depuis plus de 30 ans. Leur amour est solide et constitue un repère salvateur pour les proches qui gravitent dans leur vie. Lorsque Pat meurt subitement, Angie se retrouve démunie face à une belle-famille qui se retourne contre elle et la relègue au second plan. Sans testament, le frère de Pat devient le dépositaire légal et menace Angie de la priver de tout héritage. Seule dans un appartement qu'elle ne possède pas, Angie lutte pour ne pas disparaître d’un récit dont elle n’est plus le centre. Cette violence de l'effacement contraste avec la délicatesse extrême de la photographie du film. Les plans lents, les tons chauds, et l'ambiance sonore naturaliste participent à une sensation de douceur qui nous enveloppe, même aux pires moments d'angoisse lisibles sur le visage de la protagoniste.

On sent qu’All Shall Be Well ne veut pas brusquer ses spectateur·ices. Il pose la question de la famille en mettant en scène une expérience humaine à laquelle tout le monde peut s'identifier : la perte d'un être aimé. Le film parvient à parler de droits LGBT avec subtilité et à montrer la communauté lesbienne de Hong Kong sans la nommer comme telle. Si la loi et le sang prennent le dessus sur des amours tout juste tolérés, la dernière séquence dresse le portrait de famille le plus lumineux du film. Tout ira bien.

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Laïss Barkouk (Surimpressions)