Plaines sauvages et marais salants qui s’étendent à perte de vue. Brume épaisse et atmosphère presque irréelle. Échos de voix aux accents chantants. Animale de Emma Benestan prend aux tripes. Ce long-métrage est avant tout une œuvre organique et viscérale. Pour nous, en tant que spectateur, pris dans un cauchemar éveillé où des cornes de bêtes robustes pointent à l’orée du brouillard, autant que pour Nejma, jeune raseuteuse dont le rêve est de remporter la prochaine course camarguaise, poursuivie par des taureaux d’un noir d’encre. Jusqu’à ce que, dans son entourage d’hommes machos, des disparitions suspectes commencent à inquiéter les habitants. Une bête sauvage rôde…
Au travers de son nouveau film, Emma Benestan rentre au bercail dans cette Camargue qu’elle connaît depuis sa tendre enfance. Au sein de cet univers de taureaux et de chevaux qu’elle a déjà mis en scène dans ses œuvres précédentes, avec la fiction radiophonique Petite Sauvage, ou avec son court-métrage Un Monde sans bêtes.
Sans surprise, Animale fait la part belle à son bestiaire. Entre chevaux blancs et taureaux noirs, le bien et le mal s’enlacent dans une danse endiablée vue du ciel, dès l’ouverture du film. Un Yin et un Yang moral, présage menaçant et libérateur de l’affrontement qui nous attend, et qui reflète à merveille les questionnements de Nemja, incarnée par Oulaya Amamra.
Déjà actrice principale du premier long-métrage de Emma Benestan, Fragile, elle est grandiose dans ce rôle de jeune femme aux petits soins pour ses bêtes, dans un monde d’hommes étouffant, viriliste et brutal. L’actrice y déploie une grande subtilité dans son jeu, dans ses réactions aux transformations de son corps. Dans la lignée du cinéma de Julia Ducournau ou de Coralie Fargeat, le corps féminin et ses métamorphoses se font champ de bataille, moyens de lutte. Celui des femmes, mais aussi celui de la cause animale plaçant l'œuvre dans la lignée des écoféministes qui ont fait de cette lutte leur cheval de bataille.
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