Quelles ont été les femmes les plus influentes du XXe siècle ? Le réalisateur chilien Pablo Larraín a répondu à cette question en trois films, une trilogie de portraits entamée en 2017 avec Jackie, continuée en 2021 avec Spencer et qui se termine cette année avec Maria, un long-métrage qui s’intéresse à la cantatrice Maria Callas, alors qu’elle vit isolée du reste du monde dans son appartement parisien avec son majordome (joué par Pierfrancesco Favino) et sa femme de chambre (Alba Rohrwacher). A chaque fois, le cinéaste s’est concentré sur une période bien particulière de la vie de ces femmes : pour Jackie Kennedy (interprétée par Natalie Portman), l’assassinat de son mari et ses conséquences, pour Diana Spencer (une surprenante Kristen Stewart), l’hiver avant son divorce du prince Charles, et pour Maria Callas, les derniers jours de sa vie.
Autant d’occasions d’aborder une question aussi lancinante que fascinante : celle de la frontière entre l’image publique et la réalité intime de ces femmes devenues personnages historiques, qui ont tenté de se libérer, chacune à leur façon, de ce qu’on attendait d’elles. À l’image des autres films du réalisateur, ce qui distingue Maria d’un biopic classique est la temporalité complètement morcelée, la Maria Callas du présent revivant les méandres de son passé par larges bribes, représentées par des flashbacks en noir et banc, mais aussi le fait que la protagoniste semble hantée par des fantômes tenaces. Un sentiment d’étrangeté encore renforcé par les plans filmés caméra à l’épaule.
L’interprétation mimétique d’Angelina Jolie, qu’on n’avait plus vue depuis The Eternals, est à souligner, comme sa performance vocale (sa voix est d’ailleurs mixée avec celle de La Callas). Le travail méticuleux de recherche de Larraín se ressent dans chaque scène, des plus petits détails des costumes jusqu’aux larges plans magnifiant les décors, qui permettent une plongée captivante, presque onirique, dans la psyché et l’imagination de Maria Callas.