Miroirs No.3 porte en lui certaines promesses dès l’ouverture du film: une atmosphère étrange, presque grave s’installe quasiment instantanément. Peu à peu, le film semble même hanté par endroits.
Laura est une jeune pianiste, étudiante en musique à Berlin. Elle semble à la fois préoccupée et absente au monde qui l’entoure, et annule abruptement un week-end entre amis. Très vite, elle perd son partenaire dans un accident de voiture auquel elle survit miraculeusement. Betty, témoin du malheur, l’héberge chez elle pour la soigner. Une complicité filiale se tisse entre les deux femmes pourtant étrangères l’une à l’autre. À mesure que le lien devient fusionnel entre elles, il se mue en relation d’interdépendance inexplicable.
Le casting propose un jeu subtil allant jusqu’à une parfaite maîtrise des regards et des dialogues silencieux. Les gestes et les non-dits si bien habités, participent pleinement à la tension continue du film. Paula Beer, Barbara Auer, Matthias Brandt et Enno Trebs forment une famille reconstituée dont se dégage quelque chose d’inquiétant. On dirait des automates déréglés. Les personnages vivent des deuils parallèles et sans chercher à guérir, tentent de survivre à ce qui les accable en se servant les uns des autres. L’œuvre petzoldienne pourrait tendre vers l’horrifique en exploitant certains de ses aspects mais ne le fait jamais et se cantonne au registre dramatique.
Malheureusement, Miroirs No.3 se délite peu à peu et certaines scènes tirent en longueur, rendant le suspens de plus en plus gratuit. Quant au rythme, il est inégal : Petzold nous immerge dans un univers qu’il dessine avec soin, il campe des personnages joués méticuleusement et prouve son sens du détail, mais le dénouement se révèle décevant et convenu. Presque comme s’il n’était qu’accessoire. L'œuvre est riche même dans la sobriété, d’une précision chirurgicale à plusieurs niveaux mais s’essouffle au moment où la tension est à son comble.