L’indépendance du Congo comme vous ne l’avez jamais vue. Soundtrack to a Coup d’État est sans conteste une des propositions documentaires les plus originales de l’année en cours. Il revient sur le processus de décolonisation en Afrique, ses implications dans la Guerre froide, le cas particulier de la Belgique et du Congo et finalement sur la figure de Patrice Lumumba, Premier ministre assassiné avec la complicité des Occidentaux… en croisant ses nombreuses images d’archives avec les prestations des plus grands noms du jazz et une bande-son forcément grandiose.
Ses ambitions et sa richesse sont un peu suffocantes : il y a tellement d’informations, de clins d’œil, de connections, qu’il menace souvent de perdre son public. Peut-être aurait-il gagné à cadrer davantage son sujet. Heureusement la musique fait office de ciment et qu’on soit un aficionado ou un néophyte, on appréciera la variété des approches proposées. En refusant tout didactisme et en calquant en partie sa structure sur une rythmique de jazz, le cinéaste Johan Grimonprez se risque à expérimenter et multiplie les techniques de montage et de mixage, jouant notamment sur les parallèles, l’ironie visuelle ou encore les silences claquants.
Il y a des moments de grâce – voir Lumumba réciter un discours farouchement anticolonialiste devant un roi Baudoin déconfit, avec en fond les percussions d’Art Blakey – et d’autres d’une tristesse abyssale – la nouvelle de l’assassinat de Lumumba et les réactions internationales qui résonnent avec la voix déchirante de Abbey Lincoln. Réponse à l’actualité contemporaine, le documentaire nous rappelle que la liberté est chère à obtenir, que la violence découle toujours de l’accaparation des richesses et que la mémoire est, aussi, un terrain de luttes, de joies et de blues.
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